Quand Gribouille est aux commandes : la stratégie politique en miettes.

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J’avais publié cet article à la fin du précédent quinquenat. Il n’a malheureusement pas pris une ride. Quelques ajustements de détails ont suffit à le rafraîchir.

« Gribouille est un personnage populaire qui se jette à l’eau par peur de la pluie » nous dit Wikipédia. L’errance stratégique consiste à se mettre dans des situations inextricables, dont les effets sont pires que ceux des évènements qu’on souhaite éviter.
S’il en faillait un modèle, le meilleur serait la conduite de la chose publique par nos actuels gouvernants comme par leurs prédécesseurs. La réforme territoriale, l’écotaxe, celle des retraites, la relance du nucléaire, etc. ne sont pas des gribouillages isolés. Sur la quasi-totalité des sujets abordés, l’état donne l’exemple d’une mauvaise danse échevelée  et chaotique où la cacophonie le dispute à la précipitation.

Considérations tacticiennes et bricolage politique

Par essence la stratégie est une construction, un moyen structurant d’atteindre des objectifs prédéterminés, une composition cohérente de principes d’action. Normalement, elle tient lieu de règle de conduite dans la durée. Son efficacité potentielle est intimement liée au respect de sa substance comme de ses formes. Autrement dit, la réalisation des buts exige qu’on s’y tienne d’un bout à l’autre. Sans faillir. C’est un pari qui ne peut réussir sans constance.

Or, nos gouvernants font tout le contraire.Lire la suite

Egoïsme, cupidité, bêtise et entreprise.

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Journalistes, politiciens, responsables d’organisations professionnelles, patronales, syndicales, parlent de l’entreprise comme s’il s’agissait d’une chose homogène.
A tous propos, ils décrivent les acteurs comme des populations standards : LES patrons, LES salariés, LES chômeurs… On raisonne le monde en termes de catégories abstraites. La langue de bois a décidément de beaux stères devant elle !
Les décisions, les positions, les politiques sont déterminées selon des représentations idéalisées, lissées, médianes, monolithiques et parfaitement hypocrites, farcies d’intentions et de comportements supposés.
Le matraquage des poncifs sociétaux est tel que plus personne ne semble faire attention à cette sirupeuse et désastreuse généralisation.

Des grands mauvais patrons ?

Ce phénomène s’applique de la même façon aux dirigeants, avec la bénédiction plus ou moins délibérée de quelques organisations qui les représentent.
Pourtant, tous ceux qui ont accès à la réalité de la direction et de la gouvernance des entreprises savent pertinemment que cette figure uniforme est une aberration.
Ainsi certains entrepreneurs vont utiliser les nouveaux avantages accordés pour faire avancer durablement leur business, d’autres vont en profiter au contraire pour en tirer plus de bénéfices personnels au détriment de la pérennité de l’affaire dont ils ont la charge.

Il existe des dirigeants voyous, des despotes incongrus, voraces, imbus d’eux-mêmes, de méchants crocodiles obsédés de pouvoir et de rapacité. Ceux-là sont prêts à tout pour rouler le fisc, leurs fournisseurs, comme leurs actionnaires et leurs collaborateurs.
On nous serine à l’envi que la perdition des entreprises est due aux charges, à la conjoncture, à la crise, aux gouvernants, à l’impôt… Ce ne sont là que des facteurs accessoirement aggravants.

Bizarrement, dans les mêmes secteurs, d’autres sont en pleine santé ! Comment cela peut-il se faire ?

L’immense majorité des entreprises en difficulté plonge d’abord parce qu’elles sont très mal gouvernées, à leurs dépens, par des dirigeants obtus, égoïstes, cupides, aveugles, partiellement incompétents. Lire la suite

“Première Dame” : curieux mélange de népotisme institutionnel et d’archaïsme phallocratique

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Cet article avait été publié en juin 2014 et ajusté aujourd’hui dans son usage des temps. 

Dans l’entreprise, comme dans toutes les sortes d’organisation, le népotisme est parmi les plus graves pathologies de la gouvernance. On en connaît les ravages, des plus petites jusqu’aux plus grandes. La propriété, le pouvoir justifient trop souvent l’ascension de la « famille » aux postes intéressants. Le despote mettant ainsi la main, par la bande, sur des leviers qu’il aurait dû confier à d’autres.

Le népotisme va toujours de pair avec l’appropriation des ressources et des bénéfices, aux dépends du système gouverné, de l’organisation dirigée.

Par essence, il entraîne la prévarication, la concussion et fait le lit de la corruption. C’est, dans tous les cas, un repère de la dégradation des fondamentaux de la gouvernance et un signe annonciateur de sa future déliquescence. On le constate au quotidien dans des faillites des PME, autant que dans les fins de régimes des dictatures paraissant les plus inébranlables.

Il est ancré dans les mœurs, dans l’idéologie générale, banalisé. A tel point qu’il est valorisé plus ou moins officiellement au plus haut niveau des Etats. Il suffit d’être le conjoint ou enfant « de » pour accéder à des responsabilités et des prises de pouvoir parfois exorbitantes à la tête des nations.

En l’occurrence, il ne s’agit pas seulement des pays les plus éloignés de la démocratie, à commencer par les Etats Unis, qui nous en fournissent un exemple surréaliste. Avec l’accession au pouvoir de Donald Trump, le pire est arrivé, plaçant sa fille et son gendre aux commandes de fonctions décisives, comme le font les dictateurs de tout poil.

Quelle drôle de coutume qui confond la chose publique et la famille, la politique (au sens premier du terme) et l’amour, ou pire, le désamour !

De ce point de vue, il est heureux que Mr Fillon n’ait pas été élu président. Cela aurait créé la situation cocasse d’une nouvelle “Première Dame représentant la France” simultanément empêtrée dans des affaires d’abus de bien public, motivées à l’origine par son seul état de femme d’élu !

C’eut sûrement été un déchirement de devoir la mettre de côté pour un Epoux Président, fervent catholique, défenseur pugnace des traditions morales et moralistes d’une droite affirmée. Mais est-ce si sûr ?

Non statut ordinaire

Et si le conjoint, homme ou femme, du Président de la république avait un non-statut… de personne « normale » ?Lire la suite

Vous avez dit « vision » ? Chimères, rodomontades et leviers cachés du succès.

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Brique incontournable des « éléments de langage » de la politique d’entreprise, le mot vision est à toutes les sauces des cuisines stratégiques réputées ambitieuses. Il est aussi de toutes les rodomontades des dirigeants qui aimeraient bien croire et faire croire qu’ils en ont une, quoiqu’ils soient plutôt déboussolés par un  brouillard pâteux, parsemé d’invisibles chausse-trapes.

L’usage du mot vision est souvent l’artifice qui permet d’escamoter la difficulté à embrasser la complexité et l’emballement du monde.

La vision est aussi une réquisition ordinaire, on pourrait dire triviale, pour le profilage standard du moindre cadre supérieur. Il faudrait en avoir, ou plutôt pouvoir en produire, ou plus exactement permettre au recruteur d’avoir l’impression qu’on saurait en pondre à la commande.
Autrement-dit le critère, comme la chose, sont allègrement bidonnés. Comment se mesure la capacité à produire de la vision ? Ou mieux : à quoi ressemble-t-elle ? Au-delà de la locution de quoi s’agit-il réellement ?

Frustration

En fait, ce besoin de vision est l’expression d’un désir de contrôle répondant à une frustration. L’évolution du monde, des affaires, des positions, des besoins, des rapports de force est d’autant plus insaisissable qu’elle s’accélère. Un nombre croissant d’entreprises, d’organisations, de partis, voire d’Etats, partent en vrille, faute d’avoir pu ou su anticiper des changements ou des événements.Lire la suite

Le Staff : la camisole du dirigeant “jupitérien”

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J’observe les dirigeants, patrons, élus, depuis cinquante ans, dont plus de trente comme consultant. Quand on voit le nombre de faillites et d’échecs, d’entreprises qui  périclitent ou qui ne parviennent jamais à se débarrasser de leurs travers, force est de constater que la position ne garantit ni la compétence ni la réussite.
La gouvernance des entreprises et autres organisations de toutes sortes est un art pour le moins difficile. Le dirigeant est soumis à quelques problématiques inhérentes à sa position, qui, s’il ne les maîtrise pas, peuvent l’amener dans des égarements lourds de conséquences.Lire la suite

L’indispensable casting des manageurs

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Les mauvais manageurs sont légions. En plus de vingt ans d’exercice du conseil, j’en ai croisés et vus sévir en ribambelles, dans toutes sortes d’organisations. A la louche, j’estime que le corps managérial comporte entre 5 et 10% de nuisibles invétérés, et un bon tiers de médiocres ou de bons à rien, ou, comme disait l’oncle du Schpountz de Pagnol, de « mauvais à tout » (ou presque).

Le destin de l’oursin

A quelque niveau qu’ils se trouvent, il semble que seules leurs hiérarchies n’aient pas conscience de leur état. Comme un oursin qui a fait son trou dans un rocher par ses rotations et a fini par s’y insérer en grandissant, sans plus jamais pouvoir en sortir, il paraît impossible de les éradiquer. Ce sont eux qu’on conserve en cas de rachat ou de restructuration. Ils font leur bonhomme de chemin dans les promotions et parviennent parfois aux plus hautes responsabilités, sans que rien ne semble s’opposer à leur ascension.

De fait, ils ne sont jamais évalués sur leur compétence effective, ni sur les effets de leurs conduites dans les entités qu’ils managent. Ils peuvent les rendre  inopérantes, voire en dégrader les ressources comme la performance, il n’empêche qu’ils sont promus.

On en a vu d’ouvertement idiots, lamentables, pérorer dans des réunions de COMEX, embolisant les travaux, annihilant les efforts des autres par leur évidente incurie ; tout le monde faisant comme si de rien n’était.

Tabou

Il existe donc une sorte de consensus pour protéger les imbéciles et les méchants, les incompétents, les tordus.Lire la suite