Vous avez dit « vision » ? Chimères, rodomontades et leviers cachés du succès.

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Brique incontournable des « éléments de langage » de la politique d’entreprise, le mot vision est à toutes les sauces des cuisines stratégiques réputées ambitieuses. Il est aussi de toutes les rodomontades des dirigeants qui aimeraient bien croire et faire croire qu’ils en ont une, quoiqu’ils soient plutôt déboussolés par un  brouillard pâteux, parsemé d’invisibles chausse-trapes.

L’usage du mot vision est souvent l’artifice qui permet d’escamoter la difficulté à embrasser la complexité et l’emballement du monde.

La vision est aussi une réquisition ordinaire, on pourrait dire triviale, pour le profilage standard du moindre cadre supérieur. Il faudrait en avoir, ou plutôt pouvoir en produire, ou plus exactement permettre au recruteur d’avoir l’impression qu’on saurait en pondre à la commande.
Autrement-dit le critère, comme la chose, sont allègrement bidonnés. Comment se mesure la capacité à produire de la vision ? Ou mieux : à quoi ressemble-t-elle ? Au-delà de la locution de quoi s’agit-il réellement ?

Frustration

En fait, ce besoin de vision est l’expression d’un désir de contrôle répondant à une frustration. L’évolution du monde, des affaires, des positions, des besoins, des rapports de force est d’autant plus insaisissable qu’elle s’accélère. Un nombre croissant d’entreprises, d’organisations, de partis, voire d’Etats, partent en vrille, faute d’avoir pu ou su anticiper des changements ou des événements.Lire la suite

L’intelligence n’est malheureusement pas un critère majeur pour l’accès aux niveaux hiérarchiques supérieurs.

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Hélas, si le degré d’intelligence correspondait au niveau hiérarchique, il est probable que la réussite des entreprises serait bien supérieure à ce qu’elle est.

Malheureusement on trouve aussi des médiocres, des imbéciles et des pathos à tous les étages. Ce n’est pas nouveau, tout le monde a pu le constater.
Cela-dit, il est intéressant de comprendre comment ça marche car certaines entreprises échappent à la règle quand d’autres en ont poussé l’application jusqu’à l’aberration. Comment font les unes et les autres pour en arriver là ?

Depuis quarante ans, je participe à la vie d’un très grand nombre d’organisations et d’entreprises, dont vingt-quatre ans comme conseil ; je crois que j’ai à peu près tout vu dans le genre.

Si la compétence intellectuelle des dirigeants n’est pas le seul facteur de la réussite (ou plus exactement de la pérennité), elle en est un facteur déterminant. En tous cas, la bêtise est létale sur la durée, malgré la pertinence du concept de l’entreprise, la prévalence d’un marché conquis, ou des conditions favorables.

Tyrex et compagnie.

Commençons par un exemple imaginaire, positionné dans une grande entreprise et que je ne situerai pas dans le temps quoique j’en parle au présent pour l’agrément de la présentation. Evidemment toute ressemblance avec un cas réel serait tout-à-fait fortuite…

Le directeur d’une entité fonctionnelle du siège, ex responsable d’un des services subalternes qu’il chapeaute désormais, est revenu aux commandes après un détour de plusieurs années en profitant d’un remaniement de l’équipe de direction. Il était resté sur des concepts éculés qui faisaient les choux gras des conférenciers du siècle dernier dans son domaine.

Confus, manipulateur, obséquieux avec les gouvernants, il a l’art de pousser devant lui des formules à la mode qui lui permettent de briller au plus haut niveau mais il ne produit rien.

Dans une période de forte restructuration, il a su se rendre indispensable en étant partout, à toute heure, intervenant dans tous les dossiers, en épousant jusque dans ses facondes le développement des thèses préférées de son supérieur direct membre du COMEX, jouant le sergent fourrier des fausses révolutions idéologiques.

Nous l’appellerons Tyrex.Lire la suite