Egoïsme, cupidité, bêtise et entreprise.

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Journalistes, politiciens, responsables d’organisations professionnelles, patronales, syndicales, parlent de l’entreprise comme s’il s’agissait d’une chose homogène.
A tous propos, ils décrivent les acteurs comme des populations standards : LES patrons, LES salariés, LES chômeurs… On raisonne le monde en termes de catégories abstraites. La langue de bois a décidément de beaux stères devant elle !
Les décisions, les positions, les politiques sont déterminées selon des représentations idéalisées, lissées, médianes, monolithiques et parfaitement hypocrites, farcies d’intentions et de comportements supposés.
Le matraquage des poncifs sociétaux est tel que plus personne ne semble faire attention à cette sirupeuse et désastreuse généralisation.

Des grands mauvais patrons ?

Ce phénomène s’applique de la même façon aux dirigeants, avec la bénédiction plus ou moins délibérée de quelques organisations qui les représentent.
Pourtant, tous ceux qui ont accès à la réalité de la direction et de la gouvernance des entreprises savent pertinemment que cette figure uniforme est une aberration.
Ainsi certains entrepreneurs vont utiliser les nouveaux avantages accordés pour faire avancer durablement leur business, d’autres vont en profiter au contraire pour en tirer plus de bénéfices personnels au détriment de la pérennité de l’affaire dont ils ont la charge.

Il existe des dirigeants voyous, des despotes incongrus, voraces, imbus d’eux-mêmes, de méchants crocodiles obsédés de pouvoir et de rapacité. Ceux-là sont prêts à tout pour rouler le fisc, leurs fournisseurs, comme leurs actionnaires et leurs collaborateurs.
On nous serine à l’envi que la perdition des entreprises est due aux charges, à la conjoncture, à la crise, aux gouvernants, à l’impôt… Ce ne sont là que des facteurs accessoirement aggravants.

Bizarrement, dans les mêmes secteurs, d’autres sont en pleine santé ! Comment cela peut-il se faire ?

L’immense majorité des entreprises en difficulté plonge d’abord parce qu’elles sont très mal gouvernées, à leurs dépens, par des dirigeants obtus, égoïstes, cupides, aveugles, partiellement incompétents. Lire la suite

Délégation : Evaluez vos pratiques !

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On nous rebat les oreilles de la délégation. On nous dit régulièrement, en parlant des managers,  «  il faut les former à la délégation ». Ah bon, depuis le temps ne savent-ils toujours pas faire ? Est-ce si compliqué ?

Confusion délégation / autonomie.

A l’examen du problème, il apparaît que la « délégation » a le dos large : en fait les managers incriminés ne lâchent rien. Ils se mêlent et s’occupent de tout, interviennent à tout bout de champ dans les activités de leurs collaborateurs, tripotent à l’envi dans la moindre tâche, donnent leur avis, verrouillent les choix, mettent leur grain de sel (de sable ?) à toutes les cuisines.
Comme si toute l’activité leur appartenait, était leur terrain de jeu exclusif.
Comme s’ils savaient tout mieux faire que tout le monde.
Sous ce vocable syncrétique de « savoir déléguer » se cache donc souvent l’incapacité à organiser le travail, à délimiter ses propres missions, à exploiter les compétences et les intelligences des collaborateurs dans la réalisation de leurs propres attributions.

Ces formations qu’on nous réclame sont donc plutôt destinées à agir sur l’intention des managers de laisser leurs collaborateurs agir et s’exprimer pleinement.
Cependant, il arrive que le manager soit effectivement amené à confier, à un collaborateur, la réalisation d’un acte qui relève normalement de ses propres attributions. Auquel cas il s’agit bien de délégation. Comment fait-il ? En général il reproduit en l’occurrence son système de conduite habituel. Mais, comme il s’agit d’une tâche qui lui appartient, le manager interventionniste tend à :

  • Contrôler un peu plus intimement certains éléments en réservant des zones cachées dans les paramètres de l’opération.
  • Intervenir de façon anecdotique en cours d’exécution, sans nécessairement en informer le délégataire.
  • Considérer que l’autre doit savoir, penser, paraître et agir comme lui-même le ferait ; conformément à des évidences qui relèvent de ses traits de caractère particuliers (sinon c’est un imbécile…).
  • Simultanément se débarrasser des éléments qui l’ennuient, le contrarient ou qu’il ne saurait résoudre : à l’autre de s’en débrouiller soi-disant « pour montrer sa valeur ».
  • Pour finalement l’incriminer de tous les défauts possibles, y compris sur des critères non identifiés au départ, malgré la désinformation, les moyens absents et un mandat non annoncé à l’entourage.

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Discipliner le comportement des « managés » vis-à-vis de l’autorité.

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Il est assez banal de traiter des pratiques d’autorité, beaucoup plus rare de chercher à les discipliner dans une politique de management volontariste. Mais il est quasiment impensable de trouver une organisation qui tente de mettre un ordre formel dans les comportements d’obéissance attendus, ou pour le moins d’adéquation des comportements professionnels aux actes d’autorité.

Jachère d’entreprise.

Considère-t-on que l’encadrement des comportements sous l’autorité ’est réservé aux petits enfants, que les adultes sont nécessairement uniformément « éduqués » et pétris de l’esprit de conformation aux exigences des hiérarchies ?
Pourtant oh combien d’organisations rament douloureusement face à des salariés pour le moins résistants et dont les conduites sous l’autorité sont extrêmement variables !
Pourtant toutes les organisations n’ont ni la même  philosophie, ni les mêmes contraintes, ni les mêmes valeurs.
Mais aucune, ou presque, n’ose, ou ne songe à mettre en place un cadre de réquisition a minima sur la façon dont ses personnels (de tous niveaux) doivent réagir aux demandes et aux décisions de leurs managers N+1.
A défaut, chacun mène SA vie, enfreint plus ou moins des usages très vaguement implicites, se conforme comme il le sent à des règles intuitives. En l’occurrence, les managers de premier niveau (surtout ceux-là)  sont livrés à eux-mêmes : qu’ils s’en débrouillent !
On parle haut de « culture d’entreprise ». Mais ce paramètre est stupidement et très hypocritement laissé à l’état sauvage, aiguisant considérablement la difficulté du management.
En attendant que l’entreprise ait le courage de déployer une politique de management ambitieuse, développant particulièrement ce volet, voici de quoi faire l’état des lieux en la matière des comportements de vos collaborateurs, partenaires, hiérarchiques… et des vôtres.Lire la suite

Fiabilité/Versatilité du manageur

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Il est des manageurs qui tiennent la route, restent lucides et respectueux  en toutes circonstances, surtout quand ça va mal ; d’autres qui pètent les plombs à la moindre anicroche en s’en prenant au premier qui passe. Lequel préférez-vous ?

Des ravages de l’inconstance en management 

Les comportements erratiques sont néfastes au business, toxiques pour la motivation et significatifs d’une immaturité sociale lourde.
Entre le pire et le meilleur, il existe des degrés facilement repérables. C’est le sujet de cet article. Chacun peut s’y évaluer.
Comment peut-on confier un poste de management à une personne dont la fiabilité est inexistante, qui change d’avis comme de chemise, et tient des discours divergents aux uns et aux autres ? Chers dirigeants, (si vous-mêmes n’êtes pas ainsi) utilisez la grille pour éviter de promouvoir les plus nocifs, votre affaire y gagnera.Lire la suite

Usage de l’information et exercice du pouvoir.

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Cet article propose un outil simple de mesure des niveaux de pratiques de l’information pour vous calibrer, puis vos collaborateurs, ainsi que votre manager direct, votre hiérarchie et vos partenaires. Les résultats vous donneront directement l’état probable de votre business…

Les pratiques de gestion de l’information et de communication sont très significatives des personnalités sociales et particulièrement de la qualité du management. Elles peuvent avoir des effets directs et indirects, très puissants, sur l’optimisation ou sur la dégradation des processus et des affaires.

Pourtant, de façon extrêmement surprenante, certaines entreprises permettent à des cohortes de managers et de personnels d’en jouer à leur guise, sans règle ni garde-fou. Parfois la gouvernance donne le ‘la’ des modes les plus toxiques.

Cet article fait suite à un précédent : Optimisation des conduites professionnelles : une solution innovante et pragmatique.
Son contenu est extrait de mon premier ouvrage, coécrit en 1997 avec Pierre Massot, « Conduites professionnelles, conduites de management ». Il est épuisé mais il nous en reste pour les amateurs.
La démarche utilisée est fondatrice de la technologie originale des « Echelles de niveaux de pratiques » présentée dans un autre article. Développement, discipline et évaluation des comportements professionnels

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La “gestion” du temps, notion incongrue.

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Quoi que voudraient nous faire croire les chantres du YAKA, les prosélytes du bon sens, on ne « gère » pas son temps comme une liste de courses à faire. En réalité, on évolue et on se comporte dans le temps en étant puissamment contraint par deux types de données, externes et internes :

  • des paramètres culturels, structurels, matériels, organiques appartenant à l’environnement dans lequel on évolue. Je les ai développés dans un article récent :L’étrange pathologie du management à 2X35 heures par semaine.
  • des ressorts intimes qui structurent en profondeur notre usage du temps, bien en deçà des habitudes. C’est l’objet de cet article.

Cet article fait suite à un précédent : Optimisation des conduites professionnelles : une solution innovante et pragmatique.
Son contenu est extrait de mon premier ouvrage, coécrit en 1997 avec Pierre Massot, « Conduites professionnelles, conduites de management ». Il est épuisé mais il nous en reste pour les amateurs.
La démarche utilisée est fondatrice de la technologie originale des « Echelles de niveaux de pratiques »  présentée dans un autre article. Développement, discipline et évaluation des comportements professionnels
Ce thème y est développé parmi dix autres : l’identité professionnelle, l’autonomie, le rapport aux autres, la responsabilité (Voir Infrastructures de l’identité professionnelle , Evaluez vos capacités d’autonomie et celles de vos collaborateurs , Grille de lecture du rapport aux autres , Responsabilité : la clé de la personnalité sociale ?), le champ d’intégration, (Voir : Un outil de mesure des infrastructures de la personnalité sociale.), le rapport à l’information, le rapport à l’autorité, les pratiques de délégation, la stabilité. 

Le rapport au temps est une infrastructure de la personnalité sociale

Les conduites sociales d’une personne sont étroitement liées à sa construction du temps. Certaines personnes font « perdre du temps », tandis que d’autres en font « gagner ». Certaines agissent toujours « à temps », tandis que d’autres agissent « en avance » et d’autres encore « à contretemps ».Lire la suite

“Efficacité” de la formation : les ressorts d’un renoncement historique.

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Les dernières réformes furent autant d’opportunités ratées pour repenser les modèles culturels et idéologiques classiques, toxiques, qui dominent la formation en entreprise et en dégradent puissamment la productivité.
Dirigeants et appareils de formation auraient pu réexaminer les solutions concrètes, décalées, moins coûteuses, que nous leur proposions depuis des décennies  afin d’optimiser la production et le développement de compétences vraiment opérationnelles ?

« Avez-vous déjà songé qu’à l’issue de ce stage tout participant sera tout à fait capable de rester… INCOMPETENT ? ».

Je posais déjà la question en tête de mon premier support commercial au début des années 90 « Lettre ouverte aux commanditaires de formation ». Elle reste malheureusement d’actualité.Lire la suite

Echelle des niveaux de nuisance : de l’erreur au sabotage.

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Extrait de l’ouvrage « Gérer les personnalités difficiles au quotidien »
Cet article fait suite à Identifier et gérer ses nuisibles et Typologie des nuisibles au travail et dans la vie.

Analyse des pratiques sociales dégradées

Polo, le manutentionnaire de l’imprimerie, en a plein le dos.
D’habitude, c’est son chef qui lui crie dessus, mais aujourd’hui, même les copains s’y sont mis.
Quand on change le rouleau d’une des rotatives, tout le monde est mobilisé. La procédure est très précise et toutes les étapes de démontage, de manutention et d’installation doivent être respectées.
Après le démontage, Polo devait s’occuper d’une partie de la manutention du rouleau neuf avec le pont roulant. D’abord, le chef s’en est mêlé : « Mais enfin, Polo, c’est écrit en gros sur la procédure : doubles élingues ! Ca veut dire deux câbles, un pour lever, l’autre en sécurité… Bon ! Laisse ! Tiens, toi, Marcel, occupe-toi des élingues… »
Ensuite, Polo devait dégager l’allée centrale pour que le nouveau rouleau puisse être amené par le cariste entre les rotatives. Concentré sur sa manœuvre, celui-ci n’a pas vu qu’il écrasait la caisse contrôleuse de l’électricien… Là, c’est le chef et l’électricien qui s’en sont pris à Polo : — « On t’avait dit de dégager les allées ! »
Polo s’est défendu : « Vous aviez dit l’allée centrale, et pas toutes les allées… faudrait savoir ! Et vous n’allez pas faire toute une histoire pour une boîte à outils… »
Enfin, Polo devait rapprocher les rampes d’éclairage au-dessus du bâti ouvert. Comme il les a fait glisser un peu vite, deux rampes se sont percutées, et un tube de néon a explosé juste au-dessus de celui qui positionnait le rouleau. Là, tout le monde s’y est mis ! Polo a été écarté du groupe. En quittant l’atelier, il maugréait : « Non mais, qu’ils se débrouillent tous seuls ! Pourquoi ça devrait toujours être moi qui fais les sales corvées ! »

Le problème avec les nuisibles, c’est qu’il est très difficile de dépasser l’agacement mêlé au sentiment d’impuissance qu’on éprouve face à leurs dérapages. Pourtant, il serait utile de conserver son sang-froid et un minimum de recul pour trouver des clés dans leur fonctionnement, cela permettrait peut-être d’anticiper sur leurs comportements et d’y réagir de manière efficace.
En observant Polo, on peut penser que pour en faire autant, il faut qu’il y mette une certaine mauvaise volonté ; ses arguments sont absurdes, sa mauvaise foi incroyable ; il nous prend pour des ânes…
Est-il totalement innocent ou le fait-il exprès ? Il convient d’y regarder de plus près.Lire la suite

La formation en échec face à la pesanteur des « usages ».

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La plupart des entreprises continue à délivrer des formations sur un mode simplement didactique, sans prendre en compte les facteurs d’inertie des pratiques professionnelles réelles. Parmi eux, l’ « usage » est certainement le plus puissant.

Usage : la loi non dite et non écrite du comportement professionnel  

L’usage est un système de conventions informel qui détermine les comportements professionnels réels en situation de travail. C’est une sorte de règle non dite que tout le monde respecte néanmoins dans un environnement donné, pour une partie d’activité spécifique.

Lorsqu’un groupe d’acteurs se forme autour d’une activité dans un organisme, il adopte progressivement des habitudes de travail et de comportement pour toutes les parties d’activité le concernant. On fait les choses d’une certaine façon convenue, sans qu’il n’y ait jamais eu de débat précis sur le sujet. La règle, inscrite dans le semi conscient collectif, est intangible. S’en écarter provoque immédiatement une forte suspicion de l’entourage.
Dès lors, le modèle de comportement perdure en s’imposant aux nouveaux impétrants. Ceux-ci, afin de s’intégrer, s’efforcent de s’adapter aux coutumes locales. Ils s’en imprègnent spontanément autant que possible. En cas de déviation, ils sont rapidement recadrés de diverses manières, quolibets, plaisanteries, rappels à l’ordre en aparté, propositions d’aide, isolement, chicaneries, … La divergence est toujours douloureuse et entraîne dans tous les cas un retour forcé dans le rang.Lire la suite

Stratégie : un chemin de pensée applicable à tous les domaines

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La notion de stratégie est devenue un vocable courant dans tous les milieux, où elle peut d’ailleurs recouvrir des acceptions très diverses.
Dans tous les cas elle semble être une nécessité : il faut en avoir une, ou, pour le moins, pouvoir dire qu’on en a une, paraître ainsi maîtriser les événements et avoir conçu de façon compétente et délibérée ce qu’on fait.
C’est en raison de cette diversité de conceptions  qu’il m’a paru utile d’élaborer système d’acceptions articulées entre la stratégie et d’autres notions afférentes. Ce lexique permet de suggérer un cheminement intellectuel reproductible lors de la justification et de la communication de ses choix.
Extraits de l’ouvrage (épuisé) Fondamentaux du pilotage de la performance AFNOR Editions 2005, coécrit avec Pierre Massot.

La démarche est structurée à partir de la grille suivante qui constitue habituellement un de mes outils génériques en management.
Ses différentes déclinaisons pouvant, entre autres, servir à :

  • cheminer dans une démarche de genèse de la politique et de la stratégie,
  • assurer la partie initiale l’ingénierie de la performance,
  • définir les niveaux d’autonomie d’un collaborateur vis-à-vis de son manager (prochain article)
  • initier et conduire un projet, une activité,
  • résoudre une situation conflictuelle.

Elle se déroule de façon standard selon les étapes suivantes

Démarche d’ingénierie stratégique

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